Le naufrage du Titanic dans les premières heures du 15 avril 1912 reste la plus grande catastrophe de ce siècle.
1 517 personnes au total - hommes, femmes et enfants - y ont perdu la vie (pour seulement 711 survivants).
Le fait que le bateau le plus beau, le plus grand, le plus solide au monde - qualifié de navire - « insubmersible » - ait fait naufrage lors de son voyage inaugural est tellement incroyable que, si ce n'était pas réellement arrivé, aucun auteur n'aurait osé l'inventer. Mais la catastrophe a eu des répercussions sociales qui ont largement dépassé le cadre des événements de cette nuit-là. Pour la première fois, depuis le début de la révolution industrielle au XIXème siècle, le plus grand, le plus rapide et le plus fort s'avérait ne pas être automatiquement le meilleur. Soudain, l'essence même du progrès devait être remise en question ; se pouvait-il que l'avancement de la technologie ne constitue pas toujours un progrès ? Ce n'était pas le seul principe fondamental à être réexaminé en conséquence directe du désastre. Les cabines du bateau, réparties en première, deuxième et troisième classes, reflétaient presque exactement la hiérarchie sociale (classe supérieure, moyenne et inférieure) du monde anglophone. Mais, lorsque fut dévoilée l'énorme différence entre le nombre de survivants de chaque classe du navire - toutes les femmes, sauf deux, furent sauvées en première classe tandis que 155 femmes et enfants de la deuxième et de la troisième classes (de la troisième surtout) périrent noyés - le système social en place et ses valeurs firent l'objet d'un nouvel examen attentif, depuis longtemps nécessaire. Il n'est pas exagéré de prétendre que le XIXème siècle, avec ses structures sociales, ses codes d'honneur et de sacrifice extravagant, de même que sa croyance inébranlable que Dieu préférait les riches, prit fin cette nuit-là. La comédie musicale Titanic examine les causes, les conditions et les personnages impliqués dans ce drame qui fascine toujours. C'est l'histoire factuelle de ce bateau - de ses officiers, équipage et passagers, assurément - mais qui, contrairement à ce qui s'est passé de nombreuses fois, ne servira pas uniquement de cadre à des récits fictifs, mélodramatiques. |
Le personnage principal de notre Titanic, c'est le Titanic lui-même.
En première classe, on trouvait presque tous les multimillionnaires américains, des hommes puissants qui, avec leurs femmes et leurs familles, constituaient les clients réguliers et fréquents des grands paquebots transatlantiques. Ils avaient réservé une place pour ce premier voyage parce qu'ils avaient parfaitement le droit d'en être. La deuxième classe était remplie de marchands, de gens exerçant des professions libérales, de touristes et d'ambitieux qui ne souhaitaient rien d'autre que participer à ce brillant événement. Ils avaient réservé une traversée de manière à pouvoir se frotter aux représentants de la première classe, espérant même peut-être qu' un peu de leur charisme doré déteindrait sur eux. En troisième classe (steerage en anglais, c'est-à-dire l'entrepont), se trouvaient les émigrants de l'ancien monde, impatients d'atteindre le nouveau. Irlandais, Italiens, Scandinaves fuyaient la pauvreté et le désespoir, à la recherche de nouvelles opportunités, à la recherche de l'or dont les rues d'Amérique étaient supposées pavées. Mieux, et plus abondamment nourris que d'habitude, ils passaient, pour la première fois de leur vie, quatre jours dans l'oisiveté. Le premier acte de notre comédie musicale raconte les quatre premiers jours de cette croisière inaugurale : pendant tout ce temps, les passagers de chaque classe vivaient dans l'insouciance, goûtaient aux joies d'une traversée particulièrement calme, de plus en plus impatients d'arriver à New York. Sur le pont, les officiers expérimentaient un voyage sans anicroche , le nouveau navire se comportait parfaitement. Il est vrai que plusieurs navires croisant aux alentours avertissaient que des bancs de glace et des icebergs flottaient plus au sud qu'il n'était normal pour cette période de l'année, mais il n'y avait pas là de quoi s'inquiéter. Après tout, que pouvait-il arriver à un tel bateau ? N'avait-on pas construit seize compartiments étanches qui pouvaient être fermés mécaniquement dans le cas improbable d'une brèche ? |
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